L’EXPRESS /
Il s’appelle Yves Barta. A la télé, il plane aussi bien que le fiancé de Claudia Schiffer. Suffisant pour l’accuser de plagiat
Arnaque sur la marchandise? Publicité mensongère? David Copperfield, «le plus grand illusionniste du monde», l’amoureux de Claudia Schiffer, n’est pas le seul homme à voler dans les airs. Il le sait…
Le rival a décollé le 22 juin, lors de la dernière de «Sacrée Soirée». Jean-Pierre Foucault lance alors, avec tous les superlatifs qu’on lui connaît, Yves Barta. Parfait inconnu du monde de la magie, cet ancien steward d’Air France – ça ne s’invente pas – repéré par Gérard Louvin il y a cinq ans, s’élève dans le ciel du plateau de TF1 pendant six minutes. Comme Icare. Comme Copperfield. Tonnerre d’applaudissements: en France, personne n’a encore vu un Homo sapiens voler avec cette majesté. L’illusionniste américain s’est fait doubler. Lui «volera» seulement deux semaines plus tard sur les écrans de France 3, qui lui font l’honneur de diffuser, en juillet, trois soirées de suite, ses shows américains. 18, 16 et 13 points d’Audimat. La magie plaît. TF1 ne manque pas de sortir l’artillerie lourde, à coups de films inédits, pour combattre le magicien milliardaire… Et ça marche tout naturellement: « La magie n’est pas un spectacle télévisuel, personne n’y croit », analyse Gérard Louvin, docteur ès paillettes de la Une.
Pourtant, la vraie contre-attaque ne tarde pas. La revue de l’Afap, l’Association française des artistes prestidigitateurs, dénonce avec une virulence peu coutumière le cas Barta, le méchant copieur.
Le petit monde de l’enchantement, plutôt figé dans ses traditions – 120 professionnels, à tout casser – est outragé, choqué, offusqué par les similitudes des vols. Chorégraphie, mise en scène, éclairage, Barta, cet homme sorti de nulle part – il n’appartient pas au milieu et se garde bien de s’y mêler – aurait tout pompé… Persuadés de l’espionnage de ce dernier dans les ateliers de l’illusionniste américain, les «copperfieldiens» de ce côté-ci de l’Atlantique enragent. Super-David n’est-il pas celui qui a réussi à dépoussiérer les chapeaux claques, à remballer lapins et colombes, histoire de redorer ce vieil art ringard? Barta est roulé dans la boue, sa performance aérienne réduite à néant. «C’est un plagiat incontestable, affirme Gérard Majax, bien plus préoccupé par la situation de la magie en France que par cette polémique. C’est un épiphénomène, pas intéressant.» Point. «On ne s’improvise pas magicien comme ça. Il y a une déontologie, un code d’honneur qui interdit à tout illusionniste de copier un principe lorsqu’il s’agit d’une création – c’est le cas du tour de Copperfield. C’est son numéro, à lui!» s’énerve Georges Proust, le patron de l’Académie de magie de Paris. Dans son musée, la polémique nourrit les conversations. Les illusionnistes en herbe, récitant la leçon de leurs pairs, embraient sur le même ton: «C’est une question d’éthique, de morale. Si tous, nous effectuons les tours de Robert Houdin, on essaie toujours d’apporter notre propre créativité…» Bref, Barta serait un traître, qui salit la profession !
« J’ai toujours voulu voler »
Copperfield n’est pas en reste: embêté, gêné, il menace Barta, et donc Louvin, de procès si celui-là ne se résout pas à s’interdire ses galipettes aériennes. L’accuse vertement, aussi, de lui avoir piqué le tour du ventilateur – passer au travers d’une hélice en marche – en l’annonçant avant lui chez Foucault sans jamais l’avoir exécuté. «Il me met même en garde quant à mes illusions futures!» ironise le rival Barta, qui réfute toutes les accusations. Promis, juré, il n’a jamais vu l’Américain avant son show télé sur France 3, et n’a jamais eu de contacts avec ses ingénieurs: «J’ai toujours voulu voler, c’est pas lui qui va m’en empêcher. De tout temps les magiciens s’y sont essayés. C’est tout simplement revu et corrigé par la modernité.» Et, d’avouer, du coup, sans se compromettre: «Ma technique est vraisemblablement similaire à celle de Copperfield. La seule différence, c’est que le principe, je l’ai élaboré moi-même dans mon atelier.» Trois ans que le gars Barta, père de deux enfants, investit ses économies dans la fabrication de trucs: «C’était une passion d’enfant, revigorée après la rencontre d’un magicien – steward aussi – sur les vols long-courriers de la compagnie nationale. Le virus m’a repris, et j’ai décidé de m’adonner complètement aux grandes illusions après avoir vu le spectacle de Siegfried and Roy à Las Vegas.» Il va bricoler non-stop. Commencent alors de longues nocturnes: seul dans son garage, le magicien tout terrain – champion de France 1993 de water-polo en national 4 – se filme en Superman. En décembre dernier, las de sa vie d’ermite, il envoie sa cassette à Drucker, à Sébastien, à Canal + et à Louvin… qui accroche: «C’est un Webb moderne. Copperfield n’a rien inventé.»
Barta en veut. Il tremble face aux accusations de la machine Copperfield: «Moi, je suis un inconnu.» Louvin le soutient, rigole des attaques de l’oiseau made in USA : «Il n’a aucun intérêt à faire un procès, ou c’est Dominique Webb qui, à son tour, pourrait l’attaquer… Il n’y a pas cinquante solutions pour voler ni pour couper une femme en deux», conclut-il. Sûr de son poulain, le producteur a déjà signé un accord avec Jérôme Savary et Philippe Decouflé pour produire comme il se doit un magicien français de la trempe d’un Copperfield. Puisqu’il vole tout aussi bien, n’en déplaise à ses détracteurs.
Source : http://www.lexpress.fr/informations/magie-le-francais-qui-defie-copperfield_599794.html